Abbé FRANÇOIS LESNIAK
(1922-2002)

Le lundi 17 juin 2002, l'abbé Franciszek (François) Lesniak, de l'archidiocèse de Varsovie, est décédé à Otwock en Pologne à l'âge de 80 ans et cinq mois. Parti en mai dernier pour prononcer une série de conférences et assister à des rencontres avec des autorités diocésaines et universitaires de son pays, il est mort dans son sommeil alors qu'il séjournait chez les Soeurs de Sainte-Élisabeth. L'abbé Lesniak était très attaché à sa patrie. Certains d'entre nous l'avaient même souvent entendu affirmer qu'il désirait y mourir. Ses funérailles ont été célébrées en l'église de Prazmow, lieu de sa naissance, le vendredi 28 juin 2002. Mgr Zbigniew Kraszewski, ancien évêque auxiliaire du diocèse de Warszawa-Praga, présidait la concélébration à laquelle prenaient part plusieurs confrères du défunt. Assistèrent également à la cérémonie religieuse des délégués de l'Université catholique de Lublin, des religieuses de Sainte-Élisabeth et des Anges, ainsi que de nombreux paroissiens. À l'issu des funérailles, la dépouille mortelle a été inhumée au cimetière de Prazmow. À quelques heures d'intervalle, le même jour, un service commémoratif a été célébré à Rimouski, à la chapelle de la maison mère des Soeurs du Saint-Rosaire. Entouré de représentants du clergé diocésain, Mgr Bertrand Blanchet, archevêque de Rimouski, a présidé la concélébration à laquelle assistaient des compatriotes du défunt et plusieurs religieuses du Saint-Rosaire. L'abbé Lesniak laisse dans le deuil son frère Edwar.

Franciszek Lesniak est né en Pologne, à Prazmow, le 21 janvier 1922. Il était le fils de feu Jozef Lesniak et de feu Aleksandra Lada. Durant la Seconde Guerre mondiale, en 1942, il suit secrètement les cours du baccalauréat au Collège des sciences humaines de Grojec. Se destinant au sacerdoce, il complète ses études philosophiques et théologiques au Grand Séminaire de Varsovie de 1943 à 1948. C'est le 4 juillet 1948 qu'il est ordonné prêtre pour l'archidiocèse de Varsovie.

Au début de son ministère, il est vicaire dans diverses paroisses de Varsovie avant d'entreprendre ses études supérieures. Ainsi, de 1955 à 1962, il poursuit une formation en théologie morale et en hygiène mentale à l'Académie de théologie de Varsovie, dont il obtient une maîtrise en théologie en 1958 et un doctorat en théologie morale en 1962. Durant cette période, il s'emploie aussi à travailler comme chargé de cours en éthique à l'Académie de théologie de Varsovie (1958-1965) et en hygiène mentale à l'Université catholique de Lublin (1960-1965). C'est d'ailleurs dans cette université qu'il choisit de poursuivre ses études en psychologie (1961-1964), études qui lui permettent d'obtenir, en 1964, une maîtrise en psychologie clinique.

En 1965, il quitte la Pologne pour poursuivre ses études en psychologie clinique à l'Université de Vienne en Autriche et à l'Université de Heidelberg en Allemagne. Durant sa formation, il accepte de servir comme vicaire à la paroisse d'Allerheiligen à Vienne (1966-1967) et comme aumônier dans un hôpital de Heidelberg (1967-1970). C'est à cette époque qu'il est sollicité par le professeur Kazimierz Dabrowski, directeur du département de psychologie de l'Université Laval de Québec, pour devenir son assistant au Canada. En 1970, après un court stage à l'Hôpital Sainte-Anne de Paris - où il fait l'apprentissage de la langue française -, il accepte le poste d'assistant de recherche qui lui est offert par le professeur Dabrowski au département de psychologie de l'Université Laval. Après deux ans seulement, il est promu professeur adjoint à l'École de psychologie de l'Université Laval, alors qu'il prépare sa thèse de doctorat en psychologie clinique qu'il obtient en 1975. Résidant depuis 1971 chez les Rédemptoristes de la paroisse de St. Patrick à Québec, il assiste également les religieux dans leurs fonctions pastorales, acceptant plus particulièrement d'agir comme aumônier dans un foyer pour personnes retraitées, la St. Brigit's Home.

En 1975, il est engagé au département de psychiatrie de l'Hôpital de Mont-Joli. Il y travaille jusqu'en 1981 comme psychologue clinicien et devient bien vite une personne-ressource pour les médecins qui profitent de son expérience et de son intérêt pour les méthodes de diagnostics rapides (techniques de Hermann Rorschach et de Max Lüscher). Établi au Grand Séminaire de Rimouski en 1981, il œuvre en pratique privée comme psychothérapeute auprès des prêtres, religieux et religieuses de l'archidiocèse de Rimouski, tout en servant, entre 1982 et 1983, comme aumônier au Centre hospitalier régional de Rimouski. À partir de 1983, et ce, jusqu'à sa mort, il se rend dans sa Pologne natale au moins une fois par an pour enseigner aux étudiants de l'Université catholique de Lublin et pour donner des conférences spirituelles aux prêtres étudiants et aux religieuses. Sur une base mensuelle, il assiste également la communauté polonaise de Québec, lui dispensant les sacrements et le sacrifice de la messe durant plus de cinq ans.

Retraité en 1987, il s'intéresse toujours à la recherche en psychologie. C'est ainsi que, régulièrement et de manière active, il participe à plusieurs conférences, symposiums et congrès internationaux tenus en Amérique du Nord, en Amérique du Sud et en Europe. Fidèle à ses racines et soucieux d'encourager les échanges entre la Pologne et le Canada, il met sur pied à Lublin en 1998 l'Institut de la culture morale dont le but est de développer une croissance de la sensibilité morale chez les étudiants polonais et canadiens. Cet institut, qui dépend du département de psychologie de l'Université catholique de Lublin, est appuyé financièrement par une fondation qu'il établit en même temps à Ottawa : la Reverend Franciszek Lesniak Fundation, dont la tâche est d'assurer le support financier des activités de l'Institut. Toujours actif, il doit cependant accepter un ralentissement de ses activités à cause de sa santé, surtout après une intervention chirurgicale ayant nécessité le remplacement de la valve aortique en 1998. Malgré cela, il demeurait toujours en quête de nouveaux défis. Ainsi, depuis quelques années, il s'intéressait à la création d'un centre d'aide psychologique pour la prévention du suicide en Pologne, étant particulièrement frappé par la hausse du nombre d'étudiants suicidaires à l'université de Lublin.

L'abbé Lesniak a publié plusieurs ouvrages de psychologie, édités pour la plupart dans sa langue maternelle. En 1994, la Société polonaise d'hygiène mentale publia une des ses œuvres les plus connues, un manuel destiné aux étudiants polonais du 2e et 3e cycle universitaire, et qui est devenu depuis un véritable classique de la méthode de Rorschach (Perceptanaliza w perspektywie pozytywnej dezintegracji. Metoda Rorschacha dla zaawansowanych). Cet ouvrage fut suivi, en 1996, d'un volume consacré à la thérapie à court terme selon Talmona (M. Talmona koncepcja jednosesyjnej psychoterapii) et, en 1999, d'un traité portant sur les niveaux de développement de la personnalité selon la théorie de la désintégration positive de Dabrowski et les tests de couleurs de Lüscher (Diagnostyka Testem Kolorow M. Lueschera). L'abbé Lesniak est aussi l'auteur d'une trentaine d'articles en psychologie traduits en plusieurs langues. Mais son oeuvre maîtresse (qui devrait être publiée à titre posthume) est celle qu'il a consacrée à la formation et à la sélection des futurs prêtres et au célibat consacré dans l'esprit de la désintégration positive, une théorie à laquelle il était particulièrement attaché.

Homme doux et discret, perfectionniste dans son travail comme dans ses écrits, l'abbé Lesniak était un véritable érudit au sens classique du terme. Il connaissait aussi bien les langues anciennes que les langues modernes. Polyglotte, il parlait couramment le français, l'anglais, l'allemand et, bien évidemment, le polonais, sa langue maternelle. Depuis peu, il s'était même mis à l'étude du russe, de l'espagnol et de l'italien.

Le départ subit de l'abbé Lesniak restera placé sous le signe de l'accomplissement et de la reconnaissance. Ainsi, dans une lettre adressée en mai dernier à un intime, il disait : "je suis heureux d'avoir fait quelque chose pour ma Pologne." Bien que resté très attaché à sa terre natale, il reconnaissait qu'il se sentait bien "enraciné" dans son pays d'adoption. Il constatait même que sa mentalité était devenue plus canadienne que polonaise et que le fait de demeurer ici lui permettait de faire beaucoup plus pour la Pologne que s'il y demeurait (lettre à Mgr Bertrand Blanchet, 6 juin 1998). L'abbé Lesniak laisse un héritage admirable dans lequel ses écrits et les institutions qu'il a mis en place prennent une grande part. Mais son legs le plus important, et sans doute le plus personnel, est celui qu'il a laissé à tous ceux et à toutes celles qui l'ont fréquenté en tant qu'individu et clinicien : "Nous sommes tous témoins qu'il a aidé beaucoup de personnes, à l'une ou l'autre étape de leur vie, à analyser et comprendre ce qu'elles vivaient et à discerner ce que Dieu attendait d'elles. Et comme cela, il a pu continuer à porter des fruits jusqu'aux derniers mois de sa vie" (Mgr Bertrand Blanchet, homélie du service commémoratif).

Sylvain Gosselin, Archiviste
D'une semaine... à l'autre, vol. 37, no 15 (30 septembre 2002), annexe.

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